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Daniel : une lumière à Babylone

Éphésiens 2.8 : Sauvés par la grâce de Dieu ou par notre foi ?

8 Mars 2023 , Rédigé par Misha Publié dans #Textes commentés

« Car c’est par la grâce que vous êtes sauvés, par le moyen de la foi. Et cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu. » NBS.

Texte original : τῇ γὰρ χάριτί ἐστε σεσωσμένοι διὰ πίστεως καὶ τοῦτο οὐκ ἐξ ὑμῶν, θεοῦ τὸ δῶρον.

En grec, « la grâce » est exprimée par le terme χάρις qui regroupe plusieurs significations complémentaires : « grâce, agrément, amabilité, beauté, bienveillance, bienfait, faveur ». Dans la poésie classique, le terme χάρις est aussi associé aux notions de joie et de plaisir. Ailleurs, il peut désigner le favoritisme. Notons que χάρις n’a pas de connotation juridique. Cela ne veut pas dire que le salut est privé de tout aspect juridique, mais cette dimension est exprimée par d’autres termes que χάρις, la grâce. A méditer.

Employé ici au datif instrumental et précédé d’un article défini1, τῇ χάριτί devrait se traduire par « au moyen de la grâce », plutôt que simplement « par la grâce ». En tenant compte du fait que l’ajout de l’article défini est une forme de soulignement, comme en hébreu, on pourrait même traduire : « au moyen de cette grâce ». Car c’est cette grâce-là, unique, incomparable, divine, donnée de toute éternité par Dieu en son Fils, qui est le « moyen » de notre salut, ce n’est pas la foi comme le suggèrent la plupart des versions françaises d’Éphésiens 2.8.

La foi n’est que la réponse de l’homme, la conséquence du salut opéré par Dieu, comme l’indique l’expression διὰ πίστεως, souvent traduite par « au moyen de la foi ». En grec, la préposition διὰ suivie du génitif a une palette de sens très riche, mais elle n’indique pas que le salut s’obtient « par le fait » de la foi, comme ce pourrait être le cas si cette préposition était suivie de l’accusatif et non du génitif comme ici.

La préposition διὰ suivie du génitif indique avant tout une idée de séparation, de passage à travers. Le salut a exigé en effet une séparation et un passage douloureux à travers une expérience de foi : celle du Christ dans notre chair déchue. Cette foi-là est l’expérience déchirante que Dieu, l’auteur et l’initiateur de la foi, a faite, le premier, en Jésus-Christ, afin « d’être en tout le premier » (Colossiens 1.18).

Par suite, διὰ suivi du génitif donne une idée de prolongement, d’agent, d’instrument, d’où la traduction, certes possible : « par l’entremise de », « au moyen de » la foi. Mais il faut garder à l’esprit que l’être humain n’est qu’un instrument et un agent du salut réalisé en premier par Dieu : il a la responsabilité de mettre en œuvre(s) ce salut, mais il n’en a absolument pas la capacité, pas plus qu’il n’en a eu l’initiative. L’être humain ne fait que prolonger humblement ce que Dieu a accompli héroïquement2.

C’est bien par grâce, par pure faveur, pour le beau et le bien que Dieu vous a sauvés. Ici, dans Éphésiens 2.8, Paul présente le salut dans sa dimension objective, réalisée3. « Vous êtes sauvés » (NBS) doit être compris ici comme une certitude, un fait accompli. En grec, le verbe sauver, σώζω, signifie  « sauver, conserver, préserver, mettre à l’abri ». Il est employé ici au participe parfait moyen passif (σεσωσμένοι). Or, à la voix moyenne-passive, σώζω prend la nuance de « se souvenir, garder dans sa mémoire », nous dirions aujourd’hui « sauvegarder ». Donc être sauvés, dans Éphésiens 2.8, c’est être conservés dans la mémoire du Créateur, tout simplement. Cela suffit car il lui suffit d’une parole pour nous ramener à l’existence ! Et Dieu ne pourra jamais oublier par quelle angoisse il est passé lorsque son Fils a été livré à la mort.

Le mode participe, employé ici pour σώζω, ne permet pas de situer précisément cette action salvifique dans le temps, mais, conjugué au parfait, le participe indique ici que l’action vient d’être terminée, un peu comme le mode accompli hébreu. Dieu nous voit déjà définitivement sauvés : en Jésus, c’est fait, c’est terminé ! Alors, puisque nous sommes sauvés, ne le décevons pas : ni dans notre corps, ni dans notre esprit, ni dans nos relations. Dieu aurait trop de peine si nous perdions ce salut qu’il a payé si cher et s’il devait se passer de nous pour l’éternité ! Lire Éphésiens 4.31-32 et 5.1 ; 1 Corinthiens 6.20.

En conclusion, je propose comme traduction littérale d’Éphésiens 2.8 : « Car c’est au moyen de cette grâce que vous avez été sauvés, au travers d’une expérience de foi : et cela ne provient [ἐξ] pas de vous : de Dieu, c’est le cadeau. »              Gabriel Stauber

1. Cet ajout d’un article défini est notable, car, dans le grec du NT, comme dans l’hébreu de l’AT, la présence d’un article défini est loin d’être systématique devant les substantifs, l’article indéfini n’existant pas, ni en grec, ni en hébreu…

2. Je fais allusion ici au « Dieu-Héros » désigné en Ésaïe 9.6, traduction judicieuse de l’hébreu El Gibbor donnée par la Nouvelle Bible Segond. El Gibbor pourrait aussi se traduire par « Dieu héroïque ».

3. La double dimension, objective et subjective, du salut sera l’objet de l’étude de Jack Sequeira, p. 4, dans notre prochain numéro.

 

Article publié initialement dans Jésus, Reviens ! journal bimestriel de l'association Sentinelle des temps. Reproduit avec autorisation. 
Retrouvez tous les sommaires de Jésus, Reviens ! dans la Trousse de secours pour les temps de la fin, ou en contactant directement l'association.

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